Enseignant-chercheur à la Faculté des sciences administratives et politiques de l’Université Kurukanfuga de Bamako, Dr Ahmadou Touré, se prononce dans cet entretien sur les enjeux de la visite du Président de la Transition, le Général d’armée Assimi Goïta en Russie.
D’après l’enseignant-chercheur, cette visite s’inscrit dans une stratégie géopolitique visant à renforcer les relations bilatérales entre Bamako et Moscou. Pour Dr Ahmadou Touré, ce déplacement peut être vu comme une continuation logique du rapprochement amorcé depuis 2021, marqué par une coopération accrue avec la Russie dans les domaines sécuritaire et diplomatique. Selon lui, les enjeux de cette visite sont multiples et s’articulent autour de trois axes principaux à savoir « diplomatie et politique internationale », « sécurité et défense » et enfin « économie et développement ». Parlant de l’axe « diplomatie et politique internationale », Dr Touré dira que le Mali, sous la présidence d’Assimi Goïta, cherche à consolider sa position dans un monde multipolaire. « Cette visite permettra de renforcer le dialogue politique avec la Russie, un acteur clé qui soutient les aspirations souverainistes des pays sahéliens », a indiqué l’enseignant-chercheur. Pour lui, les discussions devraient également aborder les relations entre la Russie et la Confédération des Etats du Sahel (AES) ainsi que des questions internationales, comme la lutte contre l’influence occidentale perçue comme néocoloniale.
Sur l’axe « sécurité et défense », l’homme de droit a précisé que la coopération militaire est un pilier central des relations entre le Mali et la Russie. Mieux, il a souligné que l’accord de coopération militaire entré en vigueur en janvier dernier entre les deux pays prévoit des livraisons d’équipements, une assistance technique et la formation des Forces armées maliennes (FAMa).
« Face aux menaces terroristes persistantes au Sahel, cette visite vise à valider les prochaines étapes de ce partenariat, notamment l’acquisition de matériels militaires, y compris aériens pour renforcer les capacités des forces maliennes », a déclaré Dr Touré.
Enfin, concernant l’axe « économie et développement », l’universitaire a signalé que le Mali cherche à diversifier ses partenaires pour soutenir son redressement économique et social. Il ajoutera que les discussions pourraient porter sur des investissements russes dans des secteurs clés comme l’énergie, l’agriculture et l’exploitation des ressources naturelles (or, fer, etc).
Pour l’enseignant-chercheur, les retombées potentielles de cette visite peuvent être envisagées à court, moyen et long terme. D’après lui, des accords bilatéraux dans les domaines militaire, économique et éducatif pourraient être conclus à court terme, renforçant la coopération concrète entre les deux pays. « Par exemple, de nouvelles livraisons d’équipements militaires ou des contrats pour des projets d’infrastructures pourraient être annoncés », a fait savoir Dr Ahmadou Touré. Sur le plan de la visibilité diplomatique, dira-t-il, la visite permettra au Mali de réaffirmer son rôle de leader au sein de l’AES et de projeter une image de souveraineté sur la scène internationale.
Notre interlocuteur soutient que l’assistance militaire russe devrait améliorer les capacités opérationnelles des forces maliennes à moyen terme, potentiellement en réduisant l’insécurité dans certaines zones du Sahel. Cependant, a-t-il nuancé, l’efficacité dépendra de la qualité de la formation et de l’adaptation des équipements aux réalités locales.
S’agissant de la coopération économique, l’universitaire a déclaré que des projets dans l’énergie ou l’agriculture pourraient stimuler l’économie malienne, bien que leur mise en œuvre puisse être ralentie par des contraintes logistiques ou financières. Selon Dr Ahmadou Touré, cette visite consolide la stratégie de diversification des alliances du Mali à long terme, réduisant sa dépendance aux partenaires traditionnels comme la France.
Somme toute, Dr Ahmadou Touré pense que la visite d’Assimi Goïta en Russie est une étape stratégique pour le Mali, avec des enjeux diplomatiques, sécuritaires et économiques cruciaux. Il précise que les retombées dépendront de la capacité des deux pays à traduire leurs engagements en actions concrètes, tout en gérant les défis inhérents à ce partenariat.
B. D