
La crise qu’il y a entre le Mali et l’Algérie depuis quelques mois a pris une nouvelle tournure ces derniers temps suite à l’abattage d’un drone des Forces armées maliennes par l’armée algérienne. Dr Aly Tounkara, expert sur les questions de défense et de sécurité au Centre des études sécuritaires et stratégiques au Sahel (CE3S) nous a livré son analyse cette crise.
D’entrée de jeu, il dira que pour comprendre cette crise, il faut remonter aux différents changements survenus avec l’arrivée des militaires au pouvoir quant à la gestion faite des crises successives dans les régions dites Nord du Mali. Pour Dr Aly Tounkara, les autorités de la transition ont clairement voulu rompre avec des pratiques où l’Algérie se voyait privilégiée, se permettait d’asseoir une vraie légitimité sur le plan diplomatique au nom du dossier malien. D’après lui, il y a eu des changements brutaux en commençant par la reprise des emprises de la mission onusienne par l’Armée malienne sans que l’Algérie ne soit associée à cela. Ce qui n’était pas du goût de ce pays voisin. Aussi, le chercheur a évoqué l’entrée de l’Armée malienne à Kidal. Selon lui, les militaires au pouvoir n’ont pas associé l’Algérie à cette reprise de Kidal. Mais ce qui a encore davantage choqué l’Algérie, c’est le fait que les autorités maliennes ont dénoncé l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger sans pour autant l’associer en tant que le chef de file de la médiation internationale. Dr Tounkara soutient que tous ces éléments réunis ont fait de l’Algérie, un Etat très affaibli sur le plan diplomatique, qui voyait son influence dans le Sahel, à défaut d’être contestée, mise à mal.
Parlant de la prise de position des deux autres pays de l’AES aux côtés du Mali, l’expert du CE3S estime que c’est une suite logique pour qui connait la manière dont la Confédération a été mise en place par les trois pays. Car, toute atteinte à l’intégrité ou à la souveraineté d’un Etat membre de la confédération est aussi une atteinte à la souveraineté des autres Etats.
Le Mali accuse l’Algérie d’avoir abattu un de ses drones sur son territoire alors que l’Algérie évoque la violation de son espace aérien. Sur cette question, Aly Tounkara a fait remarquer que l’Etat du Mali a mis différents éléments à la portée de l’opinion nationale et internationale à travers un communiqué qui délimite, le champ d’action du drone dont il est question. Par contre, l’Algérie s’est contentée d’envoyer l’opinion nationale et internationale aux archives de l’Armée qui contiendrait les preuves qu’elle juge tangibles que le drone a été abattu sur son territoire. Pour lui, ce pays voisin accuse l’Etat malien d’avoir violé son espace aérien. Dr Aly Tounkara pense que l’Algérie est davantage dans la rhétorique que dans la démonstration des faits.
F. Sissoko