Crise au sommet de l’Etat : Le président de la Transition démet Choguel Kokalla Maïga de ses fonctions de Premier ministre

La sortie du désormais ancien Premier ministre Choguel Kokalla Maïga le samedi dernier où il a fait un grand déballage sur la gestion de la Transition était le signe d’une crise profonde au sommet de l’Etat. Face à cette situation, le président de la Transition le Général d’Armée Assimi Goïta a décidé de mettre fin à ses fonctions le mercredi dernier.

Avant le meeting du samedi dernier, le Premier ministre sortant avait déjà critiqué la gestion de la Transition par le biais de la tendance du M5-RFP qui lui est proche à travers un mémorandum. Ce document avait été rendu public à l’occasion du 3ème anniversaire de la rectification de la trajectoire de la Transition en mai dernier. Dans ce mémorandum, la tendance M5-RFP proche de l’ex-Premier ministre avait dénoncé un relâchement des termes du pacte d’honneur du partenariat stratégique liant les deux forces civiles et militaires pour le changement notamment le limogeage et le remplacement de presque tous les ministres du Mouvement sans consultation ni proposition de Dr Choguel Kokalla Maïga en sa double qualité de Premier ministre et de président du M5-RFP.

D’après le Mouvement, plusieurs questions majeures de la gestion gouvernementale ont été traitées sans l’associer notamment la finalisation de la réorganisation territoriale, la gestion de la crise énergétique, l’organisation de la campagne référendaire, le report des élections, les discussions sur l’Alliance des Etats du Sahel, les négociations sur certains dossiers à caractère économique et financier avec des partenaires stratégiques ainsi qu’avec des partenaires techniques et financiers. En outre, le Mouvement a estimé que l’initiative du dialogue inter-Maliens devrait servir d’alternative à la fin de l’Accord issu du processus d’Alger en matière de paix et de réconciliation. Mais la déclinaison de certaines recommandations tendancieuses a heurté l’opinion en ce qu’elles s’écartent des objectifs visés notamment, la prorogation de la durée de la Transition, l’élévation des six Colonels aux grades de Généraux et les négociations avec les chefs des groupes terroristes

Quelques semaines après, lors de la présentation de vœux des membres du M5-RFP au lendemain de la fête de Tabaski, le Premier ministre avait déclaré que personne ne peut dire qu’il y a un point qui est faux dans ce mémorandum pour lequel Bouba Traoré a été détenu.

Alors que cette sortie est encore fraiche dans les esprits, l’ex-Premier ministre a animé un meeting au nom du M5-RFP le samedi dernier sur la commémoration de la libération de Kidal, la clarification de la situation politique et des propositions pour une réorientation de la Transition.

Au cours de cette rencontre, l’ex-chef du gouvernement, qui a salué les avancées réalisées, a dénoncé certains faits majeurs sur la gestion de la Transition. Pour Dr Choguel Kokalla Maïga, la durée de la Transition a été librement fixée à 24 mois à compter du 26 mars 2022 à la suite d’un décret signé par le président de la Transition et le Premier ministre. Sur cette base, la Transition était censée prendre fin le 26 mars 2024. « Mais elle a été reportée sine die, unilatéralement sans débat au sein du gouvernement », a dénoncé l’ex-Premier ministre qui dira qu’il n’existe encore aucun débat sur la question. Et le Premier ministre est réduit à se contenter des rumeurs de la presse ou à une interprétation hasardeuse des faits et gestes du ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation. Aussi, il a révélé que le gouvernement n’a aucune information sur le programme ni le plan d’actions de l’Autorité indépendante de gestion des élections (AIGE) alors que la création de cet organe fait partie des exigences majeures du peuple malien pour la réalisation du Mali nouveau. Pour Dr Choguel Kokalla Maïga, tout se passe dans l’opacité totale à l’insu du Premier ministre.  Il a rappelé que les Assises nationales de la Refondation avaient recommandé la réduction du nombre des partis politiques, tout en précisant qu’entre 1991 et 2021 soit 30 ans, il y a eu la création de 200 partis politiques au Mali. L’ex-chef du gouvernement a révélé qu’entre 2021 et 2023 et après les Assises, il y a eu la création avec délivrance de récépissés de 100 partis politiques. Il a dénoncé une volonté délibérée d’en ajouter à la confusion. Cette sortie de l’ex-Premier ministre était la preuve d’une crise profonde au sommet de l’Etat et d’une rupture entre lui et les militaires qui ont pris le pouvoir le 18 août 2020. Avant de lui confier en juin 2021, le poste de Premier ministre. C’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Face à cette situation, le président de la Transition l’a démis de ses fonctions le mercredi dernier. 

S. Traoré