Retour des pays de l’AES dans la Cedeao : Mission impossible pour Bassirou Diomaye Faye et Faure Gnassingbé ?

Après l’annonce du retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger ainsi que la tenue du 1er sommet des chefs d’Etat, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) est déterminée à faire revenir ces trois Etats dans la communauté. Lors de son dernier sommet qui s’est tenu dimanche, l’organisation sous-régionale a désigné le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye comme facilitateur dans les discussions de la communauté avec l’AES en collaboration avec son homologue togolais Faure Essozimna Gnassingbé. La mission s’annonce difficile voire impossible pour ces deux chefs d’Etat sur lesquels, la Cedeao compte pour le retour des pays qui ont décidé d’unir leur destin à travers l’Alliance des Etats du Sahel.

Depuis l’annonce du retrait des trois pays voisins qui ont créé l’AES, l’organisation sous-régionale appelle à privilégier le dialogue et la réconciliation face aux incertitudes liées à cette situation dans la communauté.  L’organe régional a adopté cette position à l’issue d’une session extraordinaire de son Conseil de médiation et de sécurité qui s’est tenue le 8 février dernier à Abuja au Nigeria, tout en soulignant l’impérieuse nécessité de mettre l’accent sur la diplomatie et l’esprit d’unité, face aux défis qui se posent à l’échelle régionale.

A l’issue des travaux, le ministre des Affaires étrangères du Nigeria et président en exercice du Comité de médiation et de sécurité, l’ambassadeur Yusuf  Tuggar, avait déclaré que la décision prise par le Burkina, le Niger et le Mali de se retirer de l’organisation constitue un défi supplémentaire, mais que les autres membres, animés par l’esprit de coopération, sont déterminés à relever ce défi, en défendant les valeurs de la communauté.

« Nous devons mettre à profit la dynamique créée au cours de la présente session et poursuivre nos efforts en vue d’encourager les pays membres concernés à accepter le dialogue, dans un esprit de compréhension et de réconciliation », a-t-il ajouté. L’ambassadeur Tuggar avait souligné l’impact préjudiciable que ce retrait du Burkina, du Mali et du Niger pourrait avoir pour leurs citoyens.

« Le choix fait par ces trois pays de sortir de la Cedeao aura pour effet non seulement de créer de grandes difficultés pour leurs populations, mais également de saper les efforts d’intégration régionale », avait-il déclaré, avant de réaffirmer l’engagement de l’organisation sous-régionale à promouvoir le dialogue, la diplomatie et la réconciliation, qui constituent les fondements de son approche en matière de résolution des conflits au sein de la communauté.

Décision irréversible ?

Cette décision du Conseil de médiation et de sécurité est intervenue alors que, dans des correspondances adressées à la Commission de la Cedeao en réponse à ses notes verbales, les ministères des Affaires étrangères du Mali, du Burkina et du Niger avaient réitéré le caractère irréversible des décisions de leurs gouvernements de se retirer de la Cedeao. Ceci, en raison de la violation par l’organisation de ses propres textes, ainsi que les autres raisons légitimes mentionnées dans le communiqué conjoint des trois Etats en date du 28 janvier 2024.

Selon les ministères des trois pays, la Cedeao a imposé des sanctions contraires aux dispositions communautaires pertinentes du Traité révisé de l’organisation portant régime des sanctions à l’encontre des Etats membres qui n’honorent pas leurs obligations vis-à-vis d’elle. D’après les ministères des Affaires étrangères des trois Etats, ni ces textes, ni aucun instrument juridique de l’organisation ne prévoit la fermeture des frontières à un Etat membre. En outre, par cette décision, la conférence des chefs d’Etat de la Cedeao a violé le droit d’accès à la mer et depuis la mer ainsi que leur liberté de transit tel que prévu par l’article 125 de la convention des Nations unies sur le droit à la mer adopté à Montego Bay le 10 décembre 1982, soutiennent les ministères. Aussi, le caractère irrévocable de cette décision a été rappelé lors de la réunion des ministres de l’AES qui s’est tenue le jeudi 15 février dernier à Ouagadougou. Au cours de cette réunion, les ministres ont rendu hommage aux chefs d’Etat pour la décision historique et salutaire de retrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger de la Cedeao, « une institution sous-régionale qui, au fil des années, s’est éloignée des objectifs à elle assignés ». Les ministres voient en ce retrait, une opportunité pour les trois Etats de construire leur développement endogène bâti sur leurs ressources et capacités. Ils estiment que ce retrait offre aux trois Etats une nouvelle opportunité de parvenir à une fraternité, une solidarité et une intégration réelles sans aucune ingérence ni manipulation extérieure. 

Après la tenue du premier sommet des chefs d’Etat qui a créé la confédération des Etats du Sahel, quelle chance donc pour la médiation de Bassirou Diomaye Faye et de Faure Gnassingbé de réussir ? c’est la question qui taraude les esprits.

A. Sanogo