Le 17 septembre dernier à l’aube, des points sensibles de la capitale ont été visés par des attaques terroristes notamment les écoles de gendarmerie de Faladiè. La vive réaction des forces de défense et de sécurité a permis de repousser ces attaques. Dans les lignes qui suivent, Dr Aly Tounkara, expert sur les questions de défense, de sécurité et de paix au Centre des études sécuritaires et stratégiques au Sahel (CE3S) livre son analyse sur la situation sécuritaire dans le pays de façon générale. Mais aussi sur ces attaques terroristes perpétrées dans la capitale.
Pour le chercheur, en analysant la situation sécuritaire de façon générale, on s’appercoit que beaucoup de quartiers généraux de groupes radicaux violents tant dans les regions dites du Nord ainsi que celles du Centre ont été défaits. Selon Dr Aly Tounkara, les groupes radicaux violents se sont rabattus vers des localités qui ne connaissent pas forcement une présence militaire marquée en termes d’équipements et de nombre d’effectifs. Dans un langage technique, il qualifie cela d’une sorte d’enveloppement stratégique. « Lorsqu’on est aux abois au niveau des quartiers géneraux, le reflexe voudrait qu’on aille vers des localités qui sont moins hostiles en termes de présence militaire », analyse Dr Tounkara. Du point de vue analytique, il dit constater l’affaiblissement des groupes radicaux violents dans leurs quartiers généraux. Avec cet affaiblissement dira-t-il, il n’est pas étonnant d’assister à des attaques sporadiques dans des localités jusqu’ici épargnées par la présence ou les attaques des groupes radicaux violents.
« Les attaques terroristes dirigées contre des installations militaires à Bamako prouvent à combien les groupes radicaux violents, qu’ils soient d’Al-Qaeda ou l’état islamique, veulent délégitimer l’Etat vis-à-vis des populations… », soutient l’expert du CE3S. Il insiste sur le fait que ce sont des actions qui ont pour finalité de chercher à délégitimer l’Etat, à saper le moral des troupes et par ricochet, susciter la peur et l’angoisse au sein des communautés. Le chercheur estime que la manière dont l’attaque dirigée contre l’école de gendarmerie a été conduite prouve aussi qu’il y a des manquements au niveau du dispositif. Toutefois, il dira qu’une école en soi n’est pas forcément une garnison ou un camp militaire. D’où l’allègement d’un certain nombre de dispositifs sécuritaires. Au-delà de la nature même de la cible, Aly Tounkara souligne qu’il est important lorsque le pays traverse des périodes aussi troubles, que la vigilance soit de mise. A l’analyse, l’expert du CE3S pense que ces attaques démontrent que les groupes radicaux sont affaiblis. Elles prouvent également que l’Etat est moins urbain et a dû centrer ses efforts dans les environnements hostiles au Nord et au Centre. En plus de cela, elles soulignent la nécessité de trouver une sorte d’équilibre entre les zones hostiles notamment les régions du Nord et du Centre et les centres urbains en termes de présence d’effectifs et de répartition d’équipements. « Il s’agit d’assurer un maillage sécuritaire pertinent, efficace et surtout propice sur l’ensemble du territoire sans que des localités sérieusement infestées par la présence de ces groupes radicaux violents ne connaissent une sorte de recul en termes de présence militaire, de réponse proposées çà et là », explique Dr Aly Tounkara.
Parlant des attaques, il soutient que les terroristes ne peuvent prospérer dans les centres urbains que si quelques critères sont réunis. Parmi ces critères d’emblée, Dr Tounkara pense qu’il leur faut des complices pour leur fournir des logistiques que ce soient les armes, le carburant dont ils ont besoin pour se mouvoir, les moyens de locomotion à savoir des motos ou des véhicules. Selon lui, ces complices sont à coup sûr présents à Bamako. L’autre élément important qu’il avance est que les terroristes ne peuvent prospérer que s’ils ont des lieux de résidence. « Au-delà de l’aspect logistique, il y a aussi des acteurs qui leur fourniraient des lieux d’habitat ou des logements pendant tout leur séjour avant de passer à l’action violence », fait remarquer l’expert sur les questions de défense, de sécurité et de paix au CE3S.
Pour Aly Tounkara, certaines commodités leur sont assurées en termes de déplacement, de mobilité, d’équipements et de logement par des complices. Le dernier élément sur lequel il insiste est que les terroristes ne peuvent s’attaquer à un endroit aussi sensible que ce soit l’aéroport ou l’école de la gendarmerie qu’à partir des renseignements qui leur sont fournis par des acteurs qui connaissent bien les endroits attaqués. « Soit, ce sont des complices qui ont accès à ces endroits où des complices qui interagissent avec des gens qui connaissent bien ces endroits tant du point de vue géographique que du point de vue d’accessibilité à ces infrastructures », a indiqué Dr Aly Tounkara.
F. Sissoko