Lors de leur session du 10 décembre, sur la situation politique au Niger, les chefs d’Etat de la Cedeao ont rappelé les décisions prises lors de leurs sommets extraordinaires tenus le 30 juillet et le 10 août derniers. Ils ont salué dans ce cadre, les efforts engagés par le président en exercice de la conférence des chefs d’Etat, le Nigérian Bola Ahmed Tinubu en vue d’assurer un règlement pacifique de la crise politique. Les chefs d’Etat déplorent profondément le maintien en détention du président Mohamed Bazium, de sa famille et de ses collaborateurs par le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) et le manque d’engagement de la part de ce comité à rétablir l’ordre constitutionnel.
En conséquence, ils demandent au CNSP de procéder à la libération immédiate et sans condition du président Mohamed Bazoum, des membres de sa famille et de ses collaborateurs. Ils ont décidé de mettre en place un comité des chefs d’Etat composé du président togolais Faure Gnassingbé, du président sierra léonais Julius Maada Bio, de représentants des présidents nigérian et béninois pour engager le dialogue avec le CNSP et les autres parties prenantes nigériennes en vue de convenir d’une feuille de route pour une transition de courte durée, de mettre en place des organes de transition et de faciliter la création d’un mécanisme de suivi et évaluation de la transition pour le rétablissement rapide de l’ordre constitutionnel. Sur la base des résultats des discussions du comité des chefs d’Etat avec le CNSP, la conférence pourra envisager un assouplissement progressif des sanctions imposées au Niger. Si le CNSP ne se conforme pas aux conclusions des discussions avec le comité des chefs d’Etat, la Cedeao maintiendra l’ensemble des sanctions et demandera à l’Union africaine et à ses partenaires d’appliquer les actions ciblées à l’encontre des membres du CNSP et de leurs associés.
Reconnaissance du coup d’Etat
Par la suite, l’organisation sous-régionale qui exigeait le rétablissement du président Mohamed Bazoum dans ses fonctions de chef de l’Etat a fini par reconnaitre que ce dernier a été renversé par un coup d’Etat. Dans un communiqué publié ce jeudi 14 décembre, la Cedeao a indiqué que jusqu’à la 64ème session des chefs d’Etat tenue le 10 décembre, ceux-ci voyaient dans la situation survenue au Niger, une tentative de coup d’Etat et considéraient toujours Mohamed Bazoum comme le président de la République du Niger. Du fait de cette position, le Niger était suspendu des organes de décisions de l’organisation et les membres du gouvernement de Bazoum étaient habilités à représenter le pays aux réunions statutaires de la Cedeao. Toutefois, la réunion du 10 décembre de l’organisation a reconnu que le gouvernement de Mohamed Bazoum avait été effectivement renversé par un coup d’Etat militaire. Par conséquent, à compter du 10 décembre, le Niger est suspendu de l’ensemble des organes de décision de la Cedeao jusqu’au rétablissement de l’ordre constitutionnel dans le pays.
Avec ces mesures, il y a un changement de ton au niveau de la Cedeao qui menaçait encore il y a quelques semaines d’intervenir militairement pour rétablir Mohamed Bazoum dans ses fonctions de président de la République au Niger.
Pour rappel, le 26 juillet dernier, un groupe d’officiers de l’Armée nigérienne réunis au sein du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) a renversé le président Mohamed Bazoum. Ces militaires ayant pris le pouvoir ont annoncé la suspension de toutes les institutions de la VIIème République.
Face à cette situation, la Cedeao et l’Uemoa ont tenu des sommets extraordinaires le 30 juillet à Abuja au Nigeria pour indiquer que Mohamed Bazoum demeure le chef d’Etat légitime du Niger qu’elles reconnaissent, de même que l’Union africaine et la communauté internationale. Avant de prendre plusieurs sanctions avec effet immédiat contre ce pays. La Cedeao avait même donné un ultimatum de sept jours aux militaires au pouvoir afin de libérer et restaurer le président Mohamed Bazoum dans ses fonctions. A défaut de quoi, elle a brandi la menace d’une intervention militaire dans ce sens.
En réaction à ces mesures, les gouvernements du Mali et du Burkina Faso, dans un communiqué conjoint, avaient exprimé leur solidarité au peuple du Niger. Ils ont averti que toute intervention militaire contre le Niger s’assimilerait à une déclaration de guerre contre le Burkina et le Mali et entrainerait leur retrait de la Cedeao ainsi que l’adoption de mesures de légitime défense en soutien aux Forces armées et au peuple du Niger. Par la suite, le Burkina, le Mali et le Niger ont créé l’Alliance des Etats du Sahel (AES). Les décisions prises lors du sommet de dimanche dernier sont la preuve que la Cedeao a changé de ton. Il n’est plus question d’option militaire. Aussi, l’organisation sous-régionale a finalement reconnu qu’il n’y a plus de possibilité pour que le Mohamed Bazoum soit rétabli dans ses fonctions de chef d’Etat.
Adam Diarra