Le lundi 29 avril dernier, l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé a accordé à son domicile, une audience à une délégation du comité de pilotage du dialogue inter-Maliens pour la paix et la réconciliation nationale, conduite par son vice-président, Jean-Bosco Konaré.
La délégation était venue lui expliquer les objectifs du dialogue et ses termes de référence afin de recueillir son avis, ses observations et ses propositions.
L’ancien Premier ministre a salué les membres du comité de pilotage pour leurs efforts. Il leur a rappelé son opposition, dès sa conclusion, à l’Accord pour la paix et la réconciliation et son attachement à un dialogue endogène et refondateur, porteur d’un agenda malien de sortie de crise. Malgré cette situation, Modibo Sidibé a indiqué qu’un tel processus de dialogue devrait reposer sur l’implication de toutes les parties prenantes de la Nation, dans le respect de ses valeurs et de ses aspirations.
Sur la forme, Modibo Sidibé a déploré une saisine tardive à la veille de la phase quasi-terminale du processus de dialogue. D’après lui, le même unilatéralisme qui a prévalu dans la convocation et le pilotage des dialogues précédents, est aujourd’hui accentué par l’exclusion des forces politiques de l’ensemble du processus. L’ancien chef du gouvernement pense que ce manque d’inclusivité conjugué à l’absence des protagonistes de la crise, n’augure pas une prise en compte des causes profondes de la crise et de leur résorption, ni une appropriation dynamique par les citoyens.
Par ailleurs, il a regretté que des débats aussi essentiels à l’émergence d’un projet commun de résolution de crise et de redressement soient l’objet de précipitations. Il soutient que la profondeur qui sied à de tels échanges est occultée par cette course contre la montre.
Sur le fond, l’ancien Premier ministre dira que les termes de référence et les notes contiennent des narratifs pour le moins discutables dont le moindre n’est pas le silence sur les Assises nationales de la refondation, aucun résumé sur les questions dites du Nord, sur l’Accord pour la paix et la réconciliation, sur le Centre du pays, sur l’économie criminelle, l’impact sur la sécurité humaine et l’économie rurale, le risque de délitement de la cohésion sociale, sur le rôle de l’Etat et de ses démembrements…
D’après Modibo Sidibé, les cinq thématiques retenues à priori sans justification, devraient découler, comme d’autres, de l’analyse des causes multiples et profondes des conflits et, donc de leur pertinence dans le processus de résolution. Selon lui, une équipe de haut niveau aurait utilement travaillé à tout cela et préparé non pas un dialogue national répétitif, mais une concertation citoyenne échelonnée sur la base d’un cahier.
« Ce dialogue qui déborde de TDRs déjà inadéquats et notre scepticisme sur la possibilité d’ajuster à ce stade la trajectoire du DIM, nous font craindre des conclusions qui s’assimileraient davantage à un catalogue, qu’à de véritables orientations stratégiques pour le pays. Tout ceci incline à s’interroger sur l’apport de ce dialogue à la résolution de la grave crise sécuritaire qui mine notre pays », a souligné Modibo Sidibé.
L’ancien Premier ministre estime qu’un tel dialogue devrait prioritairement s’attacher à identifier les pistes pour rendre l’Etat malien plus représentatif, équitable et pourvoyeur de services pour tous les citoyens, renforçant ainsi le sentiment d’appartenance nationale chez chaque Malien.
De même, selon lui, un tel dialogue devrait présider aux réformes politiques majeures.
Modibo Sidibé a rappelé que le pays a déjà organisé plusieurs dialogues nationaux au cours des dernières années. Du Dialogue national inclusif au Dialogue inter-Maliens pour la paix et la réconciliation nationale, en passant par les Assises nationales de la refondation sans oublier la Conférence d’entente nationale.
« Cet enchevêtrement de dialogues et de recommandations laisse interrogatif : quel est le logiciel, où est la clarté, quel est le chemin tracé, quelle vision sous-tend cette multiplication de concertations ? », se demande Modibo Sidibé. Il dira que lors de chacun de ces rendez-vous importants, il a contribué de manière rigoureuse selon un fil clair et cohérent : réunir les Maliennes et les Maliens de la manière la plus inclusive afin de tracer ensemble, l’avenir du Mali entier dans son unité, sa dignité, sa sécurité et sa prospérité. « A chaque fois, nous avons martelé l’importance de traiter des vraies questions que sont le besoin d’Etat, une démocratie à refonder, une gouvernance à remodeler, l’aménagement équilibré du territoire, une politique globale et cohérente de notre géographie pour ne citer que ceux-ci et surtout un agenda consensuel de sortie de crise et de redressement du Mali sur tous les plans », a fait savoir Modibo Sidibé.
Abdoul Sanogo