Le vendredi dernier, le Mouvement ‘’Yèrèwolo debout sur les remparts’’ a organisé un meeting géant pour demander le départ de la Minusma. Au même moment, certaines organisations de la société civile des régions de Gao, Tombouctou et Kidal manifestaient et plaidaient pour son maintien à travers le renouvellement de son mandat en juin prochain.
En effet, le mandat de la Minusma arrive bientôt à son terme. Ce mandat qui est renouvelé chaque année doit l’être en fin juin prochain. Mais déjà, des voix s’élèvent pour demander son départ. C’est le cas du Mouvement ‘’Yèrèwolo debout sur les remparts’’. A l’appel de ce mouvement, plusieurs centaines de personnes se sont retrouvées au Palais de la Culture vendredi dernier pour exprimer leur mécontentement de la présence de la Minusma. Avant de demander son départ et le non renouvellement de son mandat.
Sur les pancartes des manifestants, on pouvait lire des messages de soutien aux autorités de la Transition, mais aussi aux partenaires du Mali dont la Russie. « Minusma dégage », « arrêtons la Minusma avant qu’elle ne nous arrête », « non au renouvellement du mandat de la Minusma », sont, entre autres, des messages qu’on pouvait également lire sur ces pancartes. Les différents responsables du mouvement qui ont pris la parole lors de ce rassemblement ont appelé les Maliens à sortir massivement le 25 mai prochain au Stade omnisports Modibo Keïta pour donner un carton à la Mission onusienne au Mali.
Pendant ce temps, les corps constitués de la société civile de la région de Gao, à l’issue d’une conférence de presse, demandaient le maintien de la Minusma. Selon la dizaine d’organisations de la société civile de Gao, la Minusma contribue à réaliser deux priorités stratégiques : l’appui à la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation ainsi que la transition politique. Et faciliter la mise en œuvre d’une stratégie malienne globale à orientation politique, pour protéger les civils, réduire la violence intercommunautaire, rétablir l’autorité et la présence de l’Etat ainsi que les services sociaux de base dans le Centre et le Nord du Mali.
La société civile de Gao reconnait que le résultat obtenu par la Mission n’est pas satisfaisant pour tout le monde. « Qu’à cela ne tienne, il faut se garder de jeter le bébé avec l’eau du bain », souligne la société civile de Gao, qui soutient que le contexte dans lequel évolue aujourd’hui la Mission onusienne au Mali est celui du terrorisme et de la lutte qu’il conviendrait de mener pour le vaincre et l’éliminer. « Nous déplorons que cette lutte ne soit pas incluse dans le mandat de la Minusma. C’est la raison pour laquelle, il nous apparait opportun et réaliste de revoir le mandat de la Mission pour le rendre plus robuste et adapté au contexte sécuritaire actuel du pays », ont argumenté les organisations de la société civile de Gao. Des organisations similaires dans les régions de Tombouctou et de Kidal ont aussi exprimé leur soutien à la Minusma tout en demandant le renouvellement de son mandat.
Conflit de perceptions
Dr Aly Tounkara, directeur et expert défense et securité du Centre des Etudes Sécuritaires et Stratégiques au Sahel (CE3S) a livré son analyse sur cette situation dans les colonnes du quotidien national L’Essor. Pour le chercheur, les différentes manifestations qu’il y a à travers le pays demandant le départ de la Minusma prouvent à suffisance que les attentes qu’ont les Maliens dans leur écrasante majorité ne correspondent pas à la nature du mandat de la Mission onusienne. Selon lui, beaucoup de Maliens attendent de cette Mission qu’elle soit combative et anti-terroriste. Or par sa nature, elle est plutôt une force d’interposition entre les mouvements armés signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation et les éléments des Forces de défense et de securité du Mali. D’après Dr Tounkara, il y a un conflit de perceptions sur l’utilité ou non de la Minusma en fonction du positionnement des acteurs et des enjeux en cours. Le chercheur estime que lespopulations qui vivent dans les zones où la Mission est sérieusement ancrée, n’ont pas forcement la même lecture où la même perception de la Minusma. Pour le directeur du CE3S, les Maliens vivant dans ces localités voient davantage ce qu’elle apporte en termes de développement, d’employabilité des jeunes plutôt que la sécurisation proprement dite et la lutte contre le terrorisme. C’est pourquoi, ces populations qui voient en la Minusma, une sorte de pourvoyeuse d’emplois et un gage de stabilité financière, demandent son maintien à travers le renouvellement de son mandat.
La Nouvelle Voie du Mali