C’est une mauvaise nouvelle que l’on a apprise dans la soirée de ce 12 septembre 2022, avec la dramatisation télévisuelle qui a consisté à retarder le journal de 20h, de la chaîne publique RTB, d’une demi-heure pour que le secrétaire général du gouvernement annonce ce départ inattendu. D’autant plus surprenant qu’il survient après un message du chef de l’Etat à Dori sur l’action de la junte pour la reconquête du territoire, où les responsabilités n’avaient pas été situées où les chiffres n’avaient pas été donnés.
Que s’est-il passé entre le discours de Dori, la mission de Niamey du président du Faso, accompagné par le nouveau ancien ministre de la défense nationale, pour qu’à peine rentré de Niamey, le chef de l’Etat décide de se séparer de celui qu’il avait le loisir de chasser dès le 24 janvier 2022, mais qu’il a conservé et bombardé ministre d’Etat ? Le Premier ministre a évalué les ministres ces temps-ci, est-ce à dire que de l’équipe gouvernementale, le général Simporé était le dernier de la classe ? Il est le seul qui a perdu son fauteuil ministériel à l’issue de ce remaniement. Que se passe-t-il dans cette armée en difficulté face aux groupes terroristes dont le chef de l’Etat a reconnu dans son dernier discours qu’elle était divisée ?
Un indicateur des problèmes
Personne ne doit se réjouir de cette nouvelle sauf les inconscients. C’est un signe évident que le pays est dans une mauvaise passe sinon dans l’impasse. Le départ du général Simporé est beaucoup plus un indicateur des problèmes et des difficultés que l’amorce d’une solution. Le lieutenant-colonel Damiba n’a pas innové en ajoutant la défense à ses charges. Jetons un coup d’œil en arrière et remontons jusqu’ au chef de l’Etat chassé par l’insurrection, Blaise Compaoré, il a pris le portefeuille de la défense cumulativement avec ses fonctions quand l’armée venait de connaître des mutineries. Son véritable successeur militaire sous la transition le lieutenant-colonel Isaac Zida l’a gardé au chaud près de lui au Premier ministère.
Face aux échecs militaires, le président Kaboré qui ne cachait pas son hostilité à la présence de militaire dans son gouvernement a aussi récupéré la défense avant de le redonner aux militaires en changeant de doctrine avec le général Simporé qu’il a nommé ministre de la défense, ce qui n’a pas empêché le coup d’Etat. Durant cette guerre contre les groupes terroristes, nous avons fait tomber les ministres de la défense et les chefs d’état-major de l’armée comme des boules,croyant au fétichisme de l’homme doté de super pouvoirs qui viendrait nous sauver.
Mais nous n’avons pas soigné notre stratégie, nous ne nous sommes pas occupé du moral de la troupe et nous refusons d’analyser nos échecs pour en tirer des leçons. Nous changeons seulement les hommes à chaque défaite comme si l’issue de la guerre était magique. Ainsi, nous avons seulement réussi à nommer des généraux, car à chaque changement on donnait des galons, alors qu’en temps de guerre les galons se gagnent après les victoires. Mais au Burkina, nous nous récompensons avant l’effort, avant la victoire.
Le bilan qui n’a pas été fait le 4 septembre 2022 s’affiche aujourd’hui par ce limogeage qui désigne un comptable, un coupable. Il ne peut être analysé autrement, si le chef est démis c’est qu’il a perdu. Nous ne ferons pas l’économie de ce bilan en coupant des têtes. La réflexion s’impose et est à faire, des analyses à effectuer pour voir vraiment ce qui n’a pas marché et pourquoi les options prises ne fonctionnaient pas. C’est seulement ainsi que le nouveau ne fera pas les mêmes erreurs. Dieu fasse que ce limogeage ne soit seulement que la stratégie du bouc émissaire et pas quelque chose de plus malsain en dessous dans les forces armées. Le pays va mal et très mal et nous avons besoin de sagesse et de sensibilité au malheur du peuple.
Lefaso.net