Les membres du Conseil national de Transition (CNT) ont adopté à l’unanimité le lundi dernier, le projet de loi portant ratification de l’Ordonnance n°2023/PT-RM du 29 septembre 2023 autorisant la ratification de la Charte du Liptako Gourma instituant l’Alliance des Etats du Sahel (AES) signée à Bamako le 16 septembre entre le Burkina Faso, le Mali et le Niger. Le Mali, pays dépositaire de la Charte devient aussi le premier pays à la ratifier.
Selon le rapport de la commission des affaires étrangères, des Maliens établis à l’extérieur et de l’intégration africaine du CNT, depuis plus d’une décennie, les Etats du Sahel sont confrontés à de multiples défis sécuritaires notamment l’expansion du terrorisme, du banditisme, du trafic de drogues et des personnes, le pillage des ressources naturelles. Les différentes thérapies administrées n’ont pas résisté aux épreuves du temps et ont même entrainé la dégradation de la situation sécuritaire et politique dans les Etats du Sahel.
La création du G5 Sahel en 2014 par cinq pays de la bande sahélo-saharienne à savoir le Burkina, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad avait pour objectif de lutter contre le terrorisme, l’extrémisme violent et la protection des personnes et de leurs biens. Malheureusement, l’ingérence des puissances étrangères, la démagogie de certains partenaires, l’hypocrisie de certains membres, le changement de régime au Mali, au Tchad et au Burkina Faso et le manque de financement ont entrainé l’arrêt du G5 Sahel, soutient la commission dans son rapport. Face à cette situation, le Mali, le Burkina et le Niger ont décidé de s’attaquer ensemble aux défis sécuritaires qu’ils connaissent.
Expliquant les motivations de la création de cette Alliance, le ministre Abdoulaye Diop qui a initié et défendu ce texte devant le CNT, a indiqué que les évolutions récentes dans notre région ont été fondées sur le fait que les organisations sous-régionales auxquelles nous appartenons (Cedeao, Uemoa, Bceao, etc) ne reflètent pas les aspirations des pays concernés à aller vers l’unité et l’intégration du continent, à avoir des politiques étrangères comme économiques et de développement qui soient autonomes et qu’on puisse faire face à l’ingérence extérieure. Le ministre Diop dira que la situation au Niger a fini de les convaincre que ces organisations de plus en plus menacent ces pays et les agressent. C’est pourquoi, ils ont réfléchi à une réponse politique, coordonnée qui répond aux aspirations des populations. Et c’est ce qui a amené l’idée de l’Alliance des Etats du Sahel.
A travers la Charte du Liptako Gourma qui institue l’AES, l’objectif est d’établir une architecture de défense collective et d’assistance mutuelle aux parties contractantes. Avec cette Alliance, les trois pays s’engagent à lutter contre le terrorisme sous toutes ses formes et la criminalité en bande organisée dans leur espace commun. Ils œuvreront aussi à la prévention, à la gestion et au règlement de toute rébellion armée ou autre menace armée portant atteinte à l’intégrité du territoire et à la souveraineté de chacun des pays membres de l’Alliance en privilégiant les voies pacifiques et diplomatiques et en cas de nécessité, useront de la force pour faire face aux situations de rupture de la paix et de la stabilité. Egalement, toute atteinte à la souveraineté et à l’intégrité du territoire d’une ou plusieurs parties contractantes sera considérée comme une agression contre les autres pays et engagera un devoir d’assistance et de secours de toutes les parties de manière individuelle ou collective y compris l’emploi de la force armée pour rétablir et assurer la securité au sein de l’espace couvert par l’Alliance.
Le financement de l’Alliance sera assuré par les contributions des Etats membres. Cette Charte peut être ouverte à tout autre Etat partageant les mêmes réalités géographiques, politiques, socio-culturelles et qui accepte les objectifs de l’Alliance.
Le texte a été adopté à l’unanimité des membres du CNT présents par 140 voix pour, 0 contre et 0 abstention. Le Mali désigné dépositaire de la Charte du Liptako-Gourma devient ainsi le premier pays à la ratifier.
F. Sissoko