Dans un communiqué conjoint publié hier jeudi, les ministres des Affaires étrangères de la Confédération des Etats du Sahel ont réagi vigoureusement à la déclaration jugée inappropriée du commissaire de l’Union africaine en charge des Affaires politiques, de la paix et la sécurité, lors du 65ème sommet des chefs d’Etat de la Cedeao tenu le 07 juillet dernier à Abuja au Nigeria. Cette rencontre s’est tenue au lendemain du sommet inaugural des chefs d’Etat de l’AES à Niamey au Niger.
Les ministres des Affaires étrangères disent avoir suivi, par voie de presse, les délibérations publiques de la 65ème session ordinaire de la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la Cedeao. Au cours de ce sommet, soutiennent-ils, le commissaire de l’Union africaine (UA) en charge des Affaires politiques, paix et sécurité, s’exprimant au nom du président de la Commission, a déclaré : « le retrait de trois pays de la Cedeao est inacceptable pour l’Union africaine et nous croyons en une seule Cedeao ». Pour les chefs de diplomatie du Mali, du Burkina Faso et du Niger, ce jugement de valeur est aussi surprenant qu’inhabituel de la part d’un fonctionnaire statutaire, dont les missions et les attributions ne lui confèrent aucun droit d’ingérence dans les affaires intérieures d’États membres de l’Union africaine. Par conséquent, les ministres des Affaires étrangères de la Confédération des Etats du Sahel désapprouvent et condamnent avec la dernière rigueur cette attitude, contraire au devoir de réserve et à l’obligation d’impartialité qui incombent à tout fonctionnaire d’une Organisation intergouvernementale.
Les ministres rappellent que, conformément au communiqué conjoint du 28 janvier 2024 des Etats membres de l’AES, suivi des notifications nationales transmises à la Commission de la Cedeao, le retrait du Burkina, du Mali et du Niger de l’organisation est une décision souveraine et conforme aux dispositions du Traité révisé de la Cedeao du 24 juillet 1993. D’après eux, l’approbation d’un acteur tiers ne s’inscrit pas dans la dynamique responsable de la confédération des Etats du Sahel dont la priorité est et demeure la préservation de l’intégrité territoriale de ses États membres et la défense des intérêts vitaux de ses populations. « À ce titre, toute appréciation de cette décision souveraine constitue une ingérence dans les affaires intérieures des Etats membres de la confédération des Etats du Sahel et une violation des dispositions pertinentes de la Charte des Nations unies, de l’Acte constitutif de l’Union africaine et du droit international », ont soutenu les ministres des Affaires étrangères, qui demandent à la Commission de l’UA d’indiquer la décision ou l’acte d’un des organes politiques de cette organisation sur laquelle, il se fonde pour faire de telles affirmations.
Les ministres des Affaires étrangères regrettent par ailleurs les jugements de valeur à géométrie variable de la Commission, qui n’avait pas cru utile, en 2000, de juger « inacceptable » le retrait d’un précédent membre de la Cedeao. « Cette prise de position inappropriée, inopportune et contreproductive est contraire aux principes, aux règles et à la pratique de l’UA », ont renchéri les ministres des Affaires étrangères, qui rappellent que le Burkina, le Mali et le Niger ont, depuis les premières années des indépendances, été à la pointe du combat pour l’unité du continent, la défense de sa dignité et la réalisation d’une véritable intégration africaine. Au regard de la gravité des faits et du précédent regrettable qui pourrait en découler, les ministres en appellent aux organes politiques intergouvernementaux de l’Union africaine, à savoir la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement, le conseil exécutif et le conseil paix et sécurité, afin qu’ils veillent au respect scrupuleux de la souveraineté des États membres.
F. Sissoko