G5-Sahel : Vers la dissolution  de l’organisation

Le G5-Sahel est un cadre institutionnel  de coordination et de coopération régionale en matière de politiques de développement et de sécurité, créé par cinq  pays de la bande sahélo-saharienne à savoir le Mali,  le Burkina Faso, la Mauritanie, le Niger et le Tchad. Cette organisation ne compte plus que deux Etats (la Mauritanie et le Tchad) après le retrait du Mali en mai 2022 ainsi que du Burkina et du Niger à partir du 29 novembre dernier. Alors que sa convention de création dit que sa dissolution peut se faire à la demande d’au moins trois des Etats membres.

En effet, la région du Sahel connaît depuis quelques années des attaques terroristes contre les positions des militaires et les populations  civiles. Des groupes armés terroristes présents dans les zones frontalières s’en prennent régulièrement à la population et aux institutions nationales, à travers des attaques coordonnées, en exploitant la porosité des frontières et l‘étendue des territoires. En vue d’intensifier la lutte contre ces menaces pour la paix et la sécurité qui sont aussi des entraves au développement, les cinq États membres avaient constitué une Force armée commune appelée Force conjointe du G5 Sahel.

Le 15 mai 2022, le Mali, l’un des membres fondateurs a décidé de se retirer de tous les organes et instances du G5 Sahel, y compris la Force conjointe. Les autorités maliennes ont justifié ce retrait par le non-respect des décisions prises lors du sommet de février 2021 et la violation des textes de l’Organisation. Mais aussi, l’opposition de certains Etats membres à la présidence du Mali suite à des  manœuvres d’un État extra-régional visant désespérément à isoler le Mali, l’empêchant ainsi d’assumer la présidence tournante du G5-Sahel.

De G5-Sahel  à G2-Sahel 

Après le Mali, le Burkina Faso et le Niger  ont annoncé par un communiqué conjoint le 1er décembre dernier, leur retrait de l’ensemble des instances et organes du G5-Sahel y compris la force conjointe après un examen approfondi de cette organisation et de son fonctionnement. Le Burkina  et le Niger ont souligné qu’ils maintiendront  leur dynamique de coopération au sein de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) pour faire de l’espace sahélien, un espace de souveraineté assumée pour la reconquête des territoires  et la restauration de la paix et de la sécurité, gage d’un développement partagé pour les peuples su Sahel.

Pour rappel, le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont décidé de faire face ensemble aux défis sécuritaires qu’ils connaissent depuis des années. Ils ont créé l’Alliance des Etats du Sahel (AES). Les chefs d’Etat des trois pays, le Colonel Assimi Goïta, le Capitaine Ibrahim Traoré et le Général Abdourahame Tiani ont signé le samedi 16 septembre, la Charte du Liptako Gourma qui constitue l’acte de naissance de cette nouvelle Alliance.

La création de cette Alliance par les trois Etats en transition et confrontés au terrorisme est guidée par l’esprit de fraternité, de solidarité et d’amitié, le plein exercice de leur souveraineté nationale et internationale, la défense de l’unité et de l’intégrité de leurs territoires respectifs, la lutte contre les menaces multiformes  à l’espace commun des trois Etats. L’objectif  visé par cette Alliance est d’établir une architecture de défense collective et d’assistance mutuelle aux parties contractantes. A travers elle, les trois pays s’engagent à lutter contre le terrorisme sous toutes ses formes et la criminalité en bande organisée dans leur espace commun. Ils œuvreront en outre à la prévention, à la gestion et au règlement de toute rébellion armée ou autre menace armée portant atteinte à l’intégrité du territoire et à la souveraineté de chacun des pays membres de l’Alliance en privilégiant les voies pacifiques et diplomatiques et en cas de nécessité, useront de la force pour faire face aux situations de rupture de la paix et de la stabilité. Aussi, toute atteinte à la souveraineté et à l’intégrité du territoire d’une ou plusieurs parties contractantes sera considérée comme une agression contre les autres pays et engagera un devoir d’assistance et de secours de toutes les parties de manière individuelle ou collective y compris l’emploi de la force armée pour rétablir et assurer la sécurité au sein de l’espace couvert par l’Alliance.

Après le retrait du Mali, du  Burkina et du Niger, le G5-Sahel ne compte désormais que deux Etats à savoir la Mauritanie et le Tchad. D’aucuns pensent que le retrait des trois pays consacre la fin de cette organisation qui n’a pas pu combler les attentes des Sahéliens en termes de sécurité et développement.

En réaction au départ des trois pays de l’organisation, la Mauritanie et le Tchad, dans un communiqué conjoint,  disent en prendre acte et respectent la décision souveraine des Républiques sœurs du Burkina Faso et du Niger. Ils ont réaffirmé leur attachement aux idéaux de l’intégration régionale africaine  et aux objectifs du G5-Sahel qui, malgré les difficultés et les différentes contingences aura servi  de mécanisme pertinent et d’instrument efficace de coopération entre les forces armées et de sécurité de la sous-région.  La Mauritanie et le Tchad  entendent mettre en œuvre toutes les mesures nécessaires conformément aux dispositions de la convention portant création du G5-Sahel. Aussi, les deux pays  entendent poursuivre leurs efforts  avec tous les pays du Sahel pour relever les défis auxquels la région est confrontée.  Après le retrait des trois pays, la dissolution de l’organisation parait inévitable. L’article 20 de la convention portant création du G5-Sahel est très clair. « Le G5-Sahel peut être dissout à la demande d’au moins trois Etats membres. La conférence des chefs d’Etat et de gouvernement prononce la dissolution à la majorité des Etats membres et arrête les modalités de dévolution des biens de l’organisation », dit l’article 20 de la convention portant création de l’organisation signée par les chefs d’Etat des cinq  pays  le 19 décembre 2014 à Nouakchott en Mauritanie.

S. Traoré