Après avoir quitté le G5-Sahel à cause des ingérences de puissances extérieures, le Mali, le Niger et le Burkina Faso ont également décidé de se retirer de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Alors que certains Maliens applaudissent cette décision, d’autres pensent qu’il est bien possible pour les trois pays de rester au sein de l’organisation communautaire tout en formant un bloc à travers l’Alliance des Etats du Sahel (AES).
En effet, les trois pays ont décidé de maintenir leur dynamique de coopération pour faire de l’espace sahélien, un espace de souveraineté assumée pour la reconquête des territoires et la restauration de la paix et de la sécurité, gage d’un développement partagé pour les peuples du Sahel.
Dans le communiqué conjoint à travers lequel le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont annoncé leur retrait de la Cedeao le 28 janvier dernier, ils ont déploré qu’après 49 ans d’existence, leur organisation s’est éloignée des idéaux de ses pères fondateurs et du panafricanisme.
Sous l’influence de puissances étrangères et trahissant ses principes fondateurs, elle est devenue une menace pour ses Etats membres et ses populations dont elle est censée assurer le bonheur. Aussi, l’organisation n’a pas porté assistance aux trois Etats dans le cadre de la lutte existentielle contre le terrorisme et l’insécurité. Et pire, lorsque ces Etats ont décidé de prendre leur destin en main, elle a adopté une posture irrationnelle et inacceptable en imposant des « sanctions illégales, illégitimes, inhumaines et irresponsables en violation de ses propres textes ». Toutes choses qui ont davantage fragilisé les populations déjà meurtries par des années de violence imposée par des hordes terroristes instrumentalisées et téléguidées, souligne le communiqué.
Face à cette situation qui perdure, les présidents Ibrahim Traoré, Assimi Goïta et Abdourahmane Tiani prenant toutes leurs responsabilités devant l’histoire et répondant aux attentes, préoccupations et aspirations de leurs populations, décident en toute souveraineté du retrait sans délai du Burkina Faso, du Mali et du Niger de la Cedeao, a indiqué le communiqué.
Unité régionale
Après l’annonce de leur décision de retrait, la Cedeao a exhorté les trois pays à privilégier le dialogue et la réconciliation face aux incertitudes liées à leur retrait de la communauté.
Depuis cette décision, l’organisation communautaire à travers ses instances multiplie les actions pour le maintien des trois pays en son sein. Le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a été mandaté pour mener les négociations avec les autorités de transition des trois pays pour trouver un terrain d’entente afin qu’elles reviennent sur leur décision. C’était l’objet de la visite à Bamako le 17 octobre dernier de son envoyé spécial pour le Sahel, Pr Abdoulaye Bathily. Au cours de sa visite dans la capitale malienne, il a été reçu en audience par le président Assimi Goïta. Porteur d’un message de fraternité et de solidarité du président sénégalais Bassirou Diomaye Faye, Pr Bathily a rappelé les liens indéfectibles qui unissent le Mali et le Sénégal. Avant de souligner la volonté des deux présidents de consolider l’unité régionale et africaine, malgré les défis rencontrés par certaines organisations régionales.
Appréciant la création de l’AES, Pr Bathily a appelé à maintenir la coopération entre les États de la région tout en explorant les voies d’une intégration plus large. « Ce qu’on peut accomplir à deux ou trois, il faut le faire, mais il est aussi important de continuer à explorer les collaborations plus larges et même de les améliorer », a-t-il affirmé. En clair,
l’envoyé spécial du président sénégalais pense qu’il est possible que même après la création de l’AES, que le Mali, le Burkina Faso et le Niger restent dans la Cedeao.
« Je soutiens totalement la décision des trois pays de quitter la Cedeao qui est une organisation manipulée par l’extérieur », a déclaré A. Traoré, enseignant de son état. Il soutient que dans le cas du Mali et du Niger, la Cedeao a violé ses propres textes. A.D, jeune cadre de banque abondera dans le même sens. Selon lui, depuis 10 ans, le Mali traverse une crise et cette organisation n’a pas apporté son aide comme le disent ses textes. Il estime que les trois pays ont bien fait de quitter cette organisation pour prendre leur destin en main.
M.T, opérateur économique n’est pas de cet avis. Pour lui, quitter une organisation dont son pays est membre fondateur n’est pas la solution. Selon lui, il fallait plutôt rester et se battre pour changer les choses au sein de cette organisation dont le Mali est membre fondateur. A. Koné, jeune très engagé en politique pense que le fait de quitter la Cedeao n’est pas la solution car il y aura des conséquences fâcheuses pour les populations qui n’aspirent qu’à vivre ensemble dans un espace régional sans tracasseries.
Le président de la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH) Aguibou Bouaré est aussi pour le maintien des trois pays au sein de la Cedeao. Il a multiplié des réactions sur sa page Facebook depuis l’annonce du retrait des trois Etats. « Si vous voulez plus d’intégration économique, c’est contradictoire de sortir d’une union », a-t-il écrit il y a quelques mois. Selon lui, « l’AES peut atteindre ses objectifs en restant dans la Cedeao réformée pour les populations ». Enfin, il a écrit :« que les cœurs et les esprits s’apaisent aux fins de notre maintien dans la Cedeao réformée ! ».
A. Sanogo